La vie dans les fermes
avant la deuxième guerre mondiale


      Raconté par Odile FOUSSIER et Germaine RABUSSEAU.

      Odile est la fille de Adrien Pesneau et Germaine Moreau. Elle est née en 1928 et habitait aux Rauderies.
      Germaine était bonne de ferme. Elle est née en 1919. C’est à l'âge de 13 ans qu’elle commence à travailler chez les VERNIER (à St-Branchs) pendant à peine 2 ans, puis elle va chez Robert ROBIN où elle reste seulement 2 mois. Elle travaille pendant 4 ans chez M. et Mme RAGNEAU, à la Bréchotière avant d'aller chez Paul BOILEAU de 1939 à 1941. C'est durant ces années qu'elle épouse Martial RABUSSEAU. Ils partent chez Pierre FOUASSIER avant de s'installer à la ferme des Basses Maisons en 1945. Les embauches se faisaient à la Saint-Jean.

Le maître-mot de cette époque était la cohabitation :
      - cohabitation des générations : les grands-parents vivaient sous le même toit que leurs enfants et petits-enfants.
      - cohabitation avec les employés qui étaient, à cette époque, nourris et logés.

      Avant la guerre (dans les années 30), à la ferme des Rauderies il y avait 9 personnes : les patrons et leurs 2 enfants, le grand-père, un vacher (un jeune garçon de 13-14 ans), une bonne et 2 ouvriers agricoles. Les ouvriers logeaient sur place et disposaient d'une chambre au-dessus de l'écurie. La bonne avait une chambre dans la maison. De temps en temps, un journalier pouvait travailler à la ferme. Les employés n'étaient payés qu'un fois l'an (le salaire était versé à la St Jean), et devaient donc vivre sur leurs économies.

      Le grand-père, maire de St-Branchs durant ces années-là, ne travaillait pas à la ferme.
Les tout jeunes enfants ne travaillaient pas, mais, adolescents, ils aidaient aux travaux de la ferme (à la traite notamment).

      La bonne s'occupait peu des travaux ménagers : c'est surtout la patronne qui travaillait dans la maison. Elle pouvait tout de même faire un peu de ménage, aider à la lessive et plumer des volailles pour les repas. Son travail essentiel était de s'occuper des animaux et de récolter et préparer leur nourriture.

      La patronne s'occupait de préparer les repas dans une marmite dans la cheminée et sur la cuisinière à bois.
      On trouvait dans le jardin et le verger (entretenu par le patron) tous les légumes et les fruits nécessaires. Dans l’année, on avait « tué le cochon ». La viande, le gras était conservé dans le sel ou dans des bocaux. Il y avait aussi les rillettes et les pâtés. Pour les repas, on avait donc sur place du cochon et des volailles. Pour la viande de bœuf, un boucher ambulant passait à la ferme. La patronne cuisinait les volailles en sauce ou rôties. Le cochon était souvent accompagné de pommes de terre (purée). Puis, suivaient une salade, le fromage et pour le dessert des fruits du jardin.

      La plupart du temps, le fromage était acheté à la laiterie de Ligueil, mais quelquefois, il était fait à la ferme, avec du lait de chèvre.
      Le beurre n'était pas fait à la ferme : il était acheté en grande quantité (10kg) à la laiterie. Il était ensuite fondu et mis dans des pots en grès. Puis il était utilisé en cuisine. Ca lui donnait un goût et une consistance pas toujours appréciés.

A cette époque, il y avait aux Rauderies 15 à 16 vaches et 4 ou 5 chèvres dans l'étable et 1 âne et 4 chevaux à l'écurie.

      La journée commençait à 6h par les soins aux animaux. Les femmes (parfois le vacher) allaient à l'étable pour laver les vaches avec de l'eau, puis faire la traite. La traite se faisait à la main, assise sur un petit tabouret à trois pieds avec une seille (seau) entre les jambes. Les femmes se vêtissaient d'un tablier fait dans un sac de jute.
      Pendant ce temps-là, les ouvriers allaient s'occuper des chevaux.
     Une fois ce travail terminé, on prenait le petit-déjeuner. La traite étant assez longue, les femmes mangeaient souvent après les hommes.
      Les femmes retournaient à l'étable pour nettoyer le fumier. Après avoir brossé et étrillé les vaches, la bonne ou la patronne les emmenait boire à la mare, puis les menait au champ. Une fois au champ, il fallait les garder avec l'aide d'un chien et d'un bâton. A midi, elles étaient ramenées à l'étable pour être traites.
      La patronne préparait ensuite le déjeuner, et après le repas, elle faisait la vaisselle dans une bassine d'eau chaude. A l'époque, on n'utilisait pas de produit pour la vaisselle, donc les plats restaient gras.
      « Pendant la guerre il n’y avait pas de brosse, raconte Germaine, alors on utilisait des têtes de tournesol pour faire la lessive».
      L'été, les hommes et les femmes faisaient la sieste. En hiver, les hommes allaient couper du bois et les femmes faisaient de la couture (raccommodage). Quand c’était l’époque, elles allaient effeuiller les choux, les betteraves, ou les ramasser…On allait chercher la nourriture pour les vaches avec une charrette tirée par l'âne
      A 16h, avant la traite, on donnait aux vaches du foin, puis un mélange de betteraves et de balles de blé. Avant, elles pouvaient être mises au pré pour une ou deux heures. Pendant ce temps-là, la patronne préparait le repas du soir. Le dîner ne se faisait pas avant la nuit et, en hiver, il était suivi parfois d'une veillée : les femmes faisaient du raccommodage et les hommes lisaient.

      Le dimanche après-midi était congé pour les employés, mais la bonne devait rentrer pour la traite. Cela ne représentait donc que quelques heures de liberté.

      La guerre a permis une avancée technologique importante dont ont pu bénéficier les agriculteurs et leurs femmes.
      En 1945-1946, au hameau des Rauderies, un tracteur a été acheté en coopérative (avec les voisins).
      En 1949, un poste téléphonique public a été installé chez les Pesneau ainsi qu'une machine à traire.
      Dans les années 50, la lessive a été simplifiée par l'achat à plusieurs d'une machine à laver le linge à pistons. Elle était transportée d'une ferme à l'autre avec une brouette. Elle fonctionnait à l'électricité (installée depuis 1924).
      Cette évolution a entraîné la disparition de la main d'œuvre dans les fermes.